samedi 21 avril 2012

183 jours dans la poche !

En CDD à Pôle Emploi sort en format poche. L'aventure continue avec un nouveau titre, une couverture sympathique et enfin un vrai prix accessible. Chez Pocket, à découvrir ici !

dimanche 4 septembre 2011

183 jours chez France Loisirs

183 jours dans la barbarie ordinaire est édité chez France Loisirs. Une nouvelle couverture et un mini-prix pour de nouveaux lecteurs !
Un "coup de cœur" à découvrir ici.


Altercations, incivilités, mépris : travailler à Pôle emploi vous use

Marion Bergeron est l'auteur de "183 jours dans la barbarie ordinaire", livre dans lequel elle raconte son CDD de six mois à Pôle emploi. Elle a répondu aux questions des internautes de L'Express.fr. Le chat, dans son intégralité, à retrouver en ligne.


Charly : "Barbarie"! Connaissez-vous réellement le sens de ce mot ? Ne pensez-vous pas que ce terme est inapproprié et plutôt utilisé à des fins commerciales ?
Marion B : Effectivement, le terme barbarie est fort. Mais, il illustre parfaitement ce que j'ai vécu pendant 6 mois. Une barbarie ordinaire, qui se répète chaque jour et qui vous détruit. C'est pour cela que j'ai souhaité témoigner, parce que ce que je vivais était particulièrement dur.

Sonia : Bonjour, je suis en recherche d'emploi et je suis d'accord avec vous sur le fait que Pôle emploi ce n'est pas toujours simple. Mais quand même n'abusez vous pas un peu ?
Dans mon texte, tout est vrai. C'est un témoignage. Je n'ai jamais forcé le trait. Je peux même vous dire que j'ai préféré taire certaines anecdotes qui me paraissaient trop dures. Certains de mes collègues qui ont lu le texte m'ont trouvée parfois trop dans la retenue. Il est pourtant vrai que toutes les expériences sont différentes, en fonction de l'agence dans laquelle vous vous trouvez mais aussi de la typologie sociale du lieu où elle se trouve.

Eric : Je viens de terminer votre livre. Témoignage très impressionnant, mais aussi parfois surprenant envers les chômeurs. "Sa chemise noire le saucissonne comme un petit boudin", "elle sent le poulet frit", sont quelques unes de vos expressions envers eux. N'est-ce pas aussi une forme de barbarie ordinaire ?
Lorsque l'on prend le parti de décrire la réalité telle qu'on l'a vécue, il est trop malhonnête de faire dans le politiquement correct. J'ai aussi voulu retranscrire la façon dont l'accueil peut vous abîmer et influer sur votre vision des choses. La ronde infernale des altercations, des incivilités, du mépris finit par vous user. Vous devenez dure. Merci de m'avoir lue !

Derrick : Graphiste reconvertie en conseillère pour l'emploi, vous incarnez parfaitement le paradoxe de cette administration. C'est Pôle emploi qui vous a proposé ce job ?
Non, Pôle emploi ne m'a pas proposé ce travail. Mais, j'en avais parlé à ma conseillère de l'époque et elle avait trouvé que c'était une bonne idée. D'un côté, moi, je ne trouvais pas de travail. De l'autre, Pôle emploi avait du mal à trouvé 1840 recrues. Pourtant, je pense que j'aurais pu faire une bonne conseillère, si j'avais reçu une formation digne de ce nom et si je n'avais pas été utilisée comme une rustine à l'accueil.

Bobo : Après 6 mois passés chez Pôle emploi au printemps 2009, soit 6 mois après la fusion effective des ex-organismes, pensez-vous être en mesure de décrire objectivement la situation actuelle ou est-ce un livre d'histoire ?
C'est un témoignage. Je ne fais pas une analyse documenté de Pôle emploi et de son fonctionnement. Je raconte six mois de travail précaire, de l'autre côté du guichet. Et cela, oui, je suis capable de le décrire objectivement, parce que c'est tout simplement ce que j'ai vécu.

Babette : "Je quitte mon pupitre et perd de longues secondes à contourner sa grosse masse flasque", écrivez-vous à propos d'une expérience avec un demandeur d'emploi. Pourquoi blesser gratuitement comme cela ?
Ce demandeur vient de m'agresser. J'ai du mal à le trouver séduisant, je l'avoue. Alors, je le décris tel qu'il est à ce moment-là. Quelqu'un qui n'a rien d'aimable.

vendredi 10 décembre 2010

lundi 22 novembre 2010

L'Humanité revient sur la barbarie ordinaire

Marion Bergeron a vécu l'enfer à Pôle Emploi. L'ex-conseillère dénonce "la barbarie ordinaire" d'un contrat précaire dans l'agence née de la fusion des Assedic et de l'Anpe. 
Pôle Emploi, c'est une usine à faire du chiffre !  

À lire en ligne.

samedi 20 novembre 2010

183 jours dans Closer

Un article très agréable de Closer. Pôle Emploi est définitivement un sujet au coeur des préoccupations qui trouve sa place partout. 

Dommage qu'à ce jour, aucun politique concerné par la question n'ait pris la peine de s'exprimer sur ce sujet et de dire autre chose que le factice "jusqu'ici tout va bien". À lire en ligne.

On n'est pas couché !

20 novembre. Marion Bergeron est l'invitée de Laurent Ruquier pour On n'est pas couché. Face à Zemmour et Naulleau qui ont manifestement aimé le livre, mais restent fidèles à leur rôle d'empêcheurs de tourner en rond. Et c'est tant mieux. Une séquence qui a fait la joie du zapping.

Une vidéo à retrouver ici.

Couac kafkaïen à Pôle Emploi sur Rue 89

Nathalie, une demandeuse d'emploi, a confié son parcours kafkaïen à Rue 89. Où comment un simple rendez-vous mensuel peut se transformer en cauchemar. 
Marion Bergeron n'a pu que confirmer l'absurdité et le mépris du système.


"Pôle emploi est une boîte à outils pour apprendre à réaliser un CV, suivre des formations, etc. Le problème, c'est qu'aujourd'hui, la boîte à outils s'apparente plus à une boîte à chiffres qu'autre chose."
Un article de Sylvain Malcorps à lire ici.

Médiapart : un article de Jean-Paul Baquiast

Jean-Paul Baquiast consacre, sur son blog Médiapart, un article aux 183 jours dans la barbarie ordinaire qu'il a visiblement apprécié. 

"Service public asservi, informatique détournée. Comment le pouvoir détruit les administrations. Une histoire française qui est aussi une histoire européenne..." À lire ici.

samedi 13 novembre 2010

183 jours est dans Le Monde !



Dans l'édition datée de ce samedi, une pleine page au sujet du livre, une très belle interview de Josyane Savigneau et de magnifiques photos de Richard Dumas. Tout est dans le titre : "Pôle emploi est une coquille vide", à lire ici !

vendredi 12 novembre 2010

Salut les terriens !

Samedi 9 octobre. Marion Bergeron est l'invitée de Thierry Ardisson chez Salut les terriens ! À voir en ligne.

mardi 9 novembre 2010

9 novembre : Grève nationale chez Pôle Emploi

Ce mardi 9 novembre, les syndicats lancent un appel national à la grève chez Pôle Emploi. 


Les salariés se mobilisent contre les baisses d'effectifs et pour l'amélioration de la qualité de l'accueil et du suivi. Dans un contexte tendu où le chômage est sensé être un priorité, ils dénoncent la dégradation du service, l'augmentation de la charge de travail et la machine à faire du chiffre. Bref, ils manifestent aussi pour les chômeurs qui sont, tout comme eux, victimes de la politique de Pôle Emploi.
Ils mettent même à leur disposition un tract spécialement rédigé pour eux. La liste des revendications est longue et elle aurait pu figurer en épilogue de 183 jours dans la barbarie ordinaire. En espérant que la direction de Pôle Emploi accordera plus d'importance à ce mouvement professionnel qu'elle ne l'a fait avec le livre auquel elle s'est employée à opposer un silence assourdissant.
L'article publié par Le Monde retrace bien l'état d'esprit des grévistes, on y retrouve l'ouvrage de Marion Bergeron et le quotidien d'une profession à la dérive.

mercredi 3 novembre 2010

Télérama : Y'a du boulot à Pôle Emploi !

Ce livre est "une plongée dans la déglingue sociale d'où l'on ressort essoré".

Un article de Vincent Rémy pour Télérama où l'on se demande s'il ne vaut "pas mieux être au chômage que de chercher un emploi pour les autres" et où Laurent Wauquiez a entre les mains "une bombe nommée Pôle Emploi".

mercredi 27 octobre 2010

Le Berry républicain : À l'intérieur du Pôle

Ce mercredi, le Berry républicain publie une enquête sur Pôle Emploi et sur la dégradation des conditions de travail et de suivi des demandeurs. 


Il donne la parole à deux conseillers, l'un placement, l'autre indemnisation, et à 183 jours dans la barbarie ordinaire. Un très bon dossier, complet et objectif, qui revient aussi sur le niveau du chômage et sur les difficultés des demandeurs. À lire en ligne.

À noter : malgré une documentation pertinente, le journaliste se prend les pieds dans la complexité Pôle Emploi en déclarant le 3949 gratuit pour les entreprises. Non seulement une entreprise qui appelle le 3949 payera comme tout le monde, mais en plus elle se fera éconduire, car un autre numéro spécial lui est dédié : le 3995, qui prendra sa demande en compte pour 15 cts d'euros la minutes (dixit pole-emploi.fr).

mardi 26 octobre 2010

La Grande Consultation Pôle Emploi

Hier, mardi 26 octobre, étaient publiés les résultats de la grande enquête de satisfaction lancée par Laurent Wauquiez sur les services de Pôle Emploi. Conférence de presse et dossier de présentation à l'appui, notre tendre Secrétaire d'État se targuait d'un résultat global de satisfaction de 66%. Un plébiscite. Alors que les syndicats, les associations de chômeurs et deux livres (183 jours dans la barbarie ordinaire et Confessions d'un taupe) fustigent le fonctionnement absurde du service public de l'emploi, qu'en est-il réellement ?

D'une part, et c'est là que tout s'écroule, le questionnaire a été envoyé par mail. Pour le remplir, il fallait donc disposer d'un ordinateur, d'une messagerie et d'une connexion. Ce qui est loin d'être donné à tous. C'est même une des absurdités que pointe mon ouvrage. Pôle Emploi se focalise sur ce qu'il nomme les "outils à distance" (le 3949 et internet). Pour tout ceux qui n'ont ni l'accès ni les compétences nécessaires à ces technologies, Pôle Emploi reste inatteignable.
Il est donc parfaitement judicieux, pour s'assurer de leur satisfaction, de ne s'adresser qu'aux demandeurs informatisés. On sait déjà qu'ils se dépatouillent mieux que les autres.
Bref, Laurent Wauquiez se moque de nous. C'est comme s'il envoyait un questionnaire "pour ou contre le bouclier fiscal" à ceux qui en bénéficient. On continue donc de marcher sur la tête.

De plus, sur ce panel nullement représentatif, seuls 52% se déclarent satisfait des "services proposés pour vous aider dans votre recherche d'emploi". Ce n'est pas vraiment le Pérou, sachant que l'on s'adresse à un public de demandeurs dont l'activité principale est de chercher un emploi et qui maîtrisent l'utilisation des outils imposés.

D'autre part, je me demande bien où sont passés tout ceux qui m'ont vertement enguirlandée à l'accueil, à tord ou à raison, et qui n'avaient franchement pas l'air satisfait de nos services. Ont-ils eu peur d'être radiés ? Font-ils parti des 400 000 demandeurs à qui le questionnaire a été envoyé et qui n'ont pas souhaité répondre (sur 500 000 envois) ?
D'ailleurs, Laurent Wauquiez note, sans aucune ironie, que les publics les plus fragiles sont logiquement les moins satisfaits. Quand on sait qu'il s'est contenté d'interroger le haut du panier, on est en droit de se demander ce qu'en pense le fond.

Mais Laurent Wauquiez se félicite, et Christian Charpy lui emboîte le pas. Il se permet même de dénoncer les "caricatures" à qui sa grande consultation cloue le bec. C'est donc entendu, la réalité du terrain décrite dans 183 jours est une caricature, tout comme les revendications syndicales, les dénonciations des associations de chômeurs, les tentatives de suicides, l'explosion des arrêts maladie, et le taux de chômage.

C'est d'ailleurs cela qui m'a poussé à écrire. Dès les premiers jours de mon contrat de travail, je me suis rendue compte que ce que je vivais, ce que je voyais n'existait nulle part. Les discours officiels et les articles des journaux ne disaient rien de tout cela. Ils ne parlaient ni de la misère, ni de la souffrance, ni de l'absurdité du système. Ils n'étaient qu'une longue litanie de pourcentages et de grandes phrases techniques. C'est pour cela que j'ai pris des notes. Chaque jour. Parce que si quelqu'un d'autre me l'avait raconté, je ne l'aurais pas cru. Parce que je ne voulais rien perdre de cette réalité qui défilait sous mes yeux.
C'est pour cela que j'ai pris la peine d'écrire, de publier et d'assumer ces 183 jours dans la barbarie ordinaire. Pour que la réalité du chômage, du travail et de Pôle Emploi puissent exister. Pour qu'il y ai une goutte d'eau de plus dans cette mer de contestation. Pour que les chiffres en pâte-à-modeler ne soient pas les seuls à compter.

Remercions tout de même Le Parisien qui publie une contre-enquête ainsi qu'une carte de France du nombre de chômeurs par agent.

Marion Bergeron

La Fusion pour les nuls : ce récit [...] nous a passionné

Vendredi 22 octobre, La Fusion pour les nuls, blog où deux agents (anpe et assedic) suivent le fil de la vie de pôle emploi et de la fusion. Entre actualité syndicale, dénonciation des dérives, explication de texte et humour, le site, dédié aux agents de Pôle Emploi, est devenu un vrai lieu d'échange, une référence.
Noèle et Paco, les deux mystérieux agents-blogeurs ont été passionnés par la lecture de 183 jours. Une interview s'imposait. À lire en ligne.

lundi 25 octobre 2010

183 jours pour Le Midi 2

Ce midi, Marion Bergeron était sur Le Mouv' pour les informations du milieu de journée : le Midi 2. 

Une invitation d'Amaelle Guiton et de Philippe Dana qui tombait à pic, avec la publication le matin même de l'enquête de satisfaction lancée par Laurent Wauquiez. Une émission qui traite l'actualité avec liberté, sérieux et dynamisme. À réecouter ici (juste après les titres).

Femme Actuelle : l'enfer à Pôle Emploi

Cette semaine, Femme Actuelle consacre une page à Marion Bergeron et à son expérience. Un article sous forme de témoignage rédigé par Emmanuelle Souffi qui fait la part belle au quotidien de Pôle Emploi. À lire en ligne.


À noter : l'auteur tient à préciser qu'une coquille s'est glissée dans l'article. En effet, son collègue (Bruno, cité dans les dernières lignes)  ne s'est pas suicidé, mais a, heureusement, seulement tenté de mettre fin à ses jours.

vendredi 22 octobre 2010

Midi Libre : Pôle Emploi, la violence fait partie du quotidien

L'édition du 22 Octobre du Midi Libre consacre un encart aux 183 jours dans la barbarie ordinaire. À lire en ligne

Une interview rapide, où les réponses ont été quelque peu réécrites, avec quelques raccourcis, mais qui donne le pouls de l'ensemble du texte, du fonctionnement destructeur de Pôle Emploi et qui prend le temps de s'interroger sur l'origine de la souffrance des agents.

jeudi 14 octobre 2010

Les Inrocks : Dans l'enfer de Pôle Emploi

Cette semaine, dans Les Inrocks, une interview de Marion Bergeron qui fait la part belle aux aberrations de Pôle Emploi, à la dimension du témoignage, et au fragile équilibre entre travail et vie privée.

"Pôle Emploi : un rouleau compresseur qui maltraite ses usagers comme ses employés. "

lundi 11 octobre 2010

Édition spéciale sur Canal +

Lundi 11 octobre. 12h30. Marion Bergeron est l'invitée de Bruce Toussaint sur Canal + dans l'édition spéciale. À voir en ligne, une interview qui revient sur les dysfonctionnements de Pôle Emploi.

samedi 9 octobre 2010

France Inter : On n'arrête pas l'éco !

Samedi 9 octobre, sur France Inter, Marion Bergeron est l'invitée d'Alexandra Bensaïd pour son émission radiophonique "On n'arrête pas l'éco". Un sujet autour du thème du travail, à écouter sur le site de France Inter.

jeudi 7 octobre 2010

En librairie aujourd'hui !

Les 183 jours dans la barbarie ordinaire sont en librairie. Ils n'attendent que vous pour exister. Toute l'équipe du livre vous souhaite une très bonne plongée dans les entrailles de Pôle Emploi !



Vous pouvez également vous procurer l'ouvrage sur le net, notamment à la Fnac ou chez Amazon.

Pôle Emploi : des nouvelles du front

La direction de Pôle Emploi vient de rédiger et de faire parvenir à ses agents une note relative à la prévention et au traitement des agressions à Pôle Emploi. C'est certes un petit pas dans la reconnaissance des difficultés quotidiennes des agents, mais il est rassurant de constater que le livre permet de faire bouger les choses. Cette note, qui propose une vraie définition des agressions (de l'incivilité à l'atteinte physique), donne également des pistes pour les agents confrontés à de telles situations : échange en équipe, droit de retrait, possibilité de faire appel à la justice, etc.

"Ces dispositifs existaient déjà, mais, parce que la peur et la violence nuisent autant aux personnels qu'aux usagers, et parce qu'elles ont été présentes, chaque jour, pour moi, à l'accueil de Pôle Emploi, il est important qu'elles ne restent plus un tabou et qu'elles soient reconnues par l'organisation et tous ses agents."
Marion Bergeron

Terrafemina : Pôle Emploi, une énorme usine à chiffre !

Le site Terrafemina publie, pour la sortie du livre, une interview de l'auteur : Six mois dans l'enfer de Pôle Emploi. L'occasion de livrer une analyse de la situation de Pôle Emploi et de son incapacité à assurer sa mission.

lundi 4 octobre 2010

Interview pour L'Union de Reims

Dimanche 3 octobre. Pour Grégoire Amir-Tahmasseb, dans la rubrique "bouquins" du quotidien l'Union, Marion Bergeron revient sur  son expérience. Un retour sur les conditions de travail et d'accueil des demandeurs chez Pôle Emploi, et sur le besoin de témoigner. 

"Ce que je voyais chaque jour était tellement violent, absurde [...] je me suis dit qu'il fallait que les gens sachent."

Entretien à lire sur le site de l'Union !

samedi 25 septembre 2010

Le Monde.fr : Pôle Emploi, le mal-être

La rubrique économie du Monde.fr publie un article sur la situation des agents de Pôle Emploi et présente 183 jours dans la barbarie ordinaire.


LES AGENTS DE PÔLE EMPLOI RESTENT EN SITUATION DE CRISE
[...] Le 7 octobre sera publié 183 jours dans la barbarie ordinaire - En CDD chez Pôle emploi, témoignage de l'une des 1 840 embauches temporaires intervenues en 2009 à la demande de Nicolas Sarkozy pour gonfler les effectifs face à la crise.
Les premiers extraits de l'ouvrage, qui ne prétend pas refléter le fonctionnement du Pôle emploi au niveau national, rapporte cependant des situations de stress communément dénoncées face à la surcharge et à l'organisation du travail, ou l'agressivité de certains demandeurs d'emploi.

Michaël Szadkowski détaille la situation des agents, la dégradation des conditions de travail, la mise à mal de la qualité du service et les impacts de la crise. Il revient également sur l'augmentation de la souffrance des personnels et donne la parole à Marie-Françoise Leflon, déléguée CGC et membre du conseil d'administration du Pôle emploi, qui revient sur l'impossibilité de la fusion, son absurdité et sa violence.

jeudi 23 septembre 2010

France Inter : Pôle Emploi, une fusion qui divise

19 septembre, 9h10, Interception, l'émission de Lionel Thompson et Pascal Dervieux diffusée sur France Inter est allée faire un tour chez Pôle Emploi.  À écouter : des témoignages de demandeurs et d'agents, quelques mots rassurants de Christian Charpy, mais aussi une intervention de Benoît Génuini, ancien médiateur de Pôle Emploi, qui a démissionné de ses fonctions en avril 2010.

PÔLE EMPLOI : UNE FUSION QUI DIVISE

Pôle emploi a lancé mi-septembre une grande enquête auprès des chômeurs, des entreprises et de ses propres salariés. 500.000 demandeurs d’emploi et 50.000 entreprises vont recevoir d’ici la fin de la semaine prochaine un questionnaire sur le fonctionnement de cet organisme issu de la fusion, il y a un peu moins de 2 ans, de l’ANPE et des Assedic. Les résultats de cette étude seront ensuite rendus publics courant octobre. L’enjeu est important, il concerne l’image d’un organisme voulu par Nicolas Sarkozy et présenté comme un instrument majeur de la lutte contre le chômage, la préoccupation numéro un des français.

Le gouvernement considère toujours la création de Pôle emploi comme une réussite mais le lancement de cette enquête montre qu’il y a sans doute de sérieuses améliorations à apporter à ce service public. Depuis sa création, Pôle emploi, qui a dû affronter une montée du chômage dû à la crise, est en effet l’objet de vives critiques. De la part des chômeurs, qui lui reprochent notamment des radiations abusives, mais aussi de la part de nombreux salariés de Pôle emploi qui estiment ne pas être en mesure de remplir correctement leur mission.

Les témoignages de chômeurs et d’agents de Pôle emploi ont été receuilli par Cyril Graziani. À noter également, l'intervention de Gaël Guiselin, l'auteur des "Confessions d'une taupe à Pôle Emploi" qui revient sur la nécessité de témoigner.

mardi 31 août 2010

Figaro blog : Les dessous du social en parle

Le 31 août, Marc Landré, rédacteur du fameux blog "Les dessous du social" du Figaro.fr, a reçu 183 Jours en avant-première.


PÔLE EMPLOI : DANS LA PEAU D'UN CONSEILLER
ENCORE UN OUVRAGE sur l'enfer de Pôle emploi qui devrait donner quelques sueurs froides à son directeur général, Christian Charpy, et à son ministre de tutelle, Laurent Wauquiez. Le 7 octobre prochain sort aux éditions Plon un nouveau pamphlet intitulé "183 jours dans la barbarie ordinaire - En CDD chez Pôle emploi", soit sept mois quasiment jour pour jour après la mise en vente des désormais célèbres "confessions d'une taupe à Pôle emploi" publiées en mars dernier.

Il ne s'agit nullement, contrairement à ce que son titre pourrait laisser penser, d'un brulot anti Pôle emploi mais d'un témoignage parfois émouvant. L'ouvrage retrace sur 236 pages - que "Les dessous du social" ont pu lire en avant-première - le quotidien de Marion Bergeron, jeune graphiste de 24 ans au chômage recrutée en CDD pour six mois début 2009 pour renforcer les effectifs de l'agence qui avait fusionné, au 1er janvier, l'ANPE avec les Assedic. De son arrivée - non annoncée dans l'agence et en pleine crise d'hystérie d'une demandeuse d'emploi - à son départ 183 jours plus tard, un mois tout juste après s'être fait plaquer par son amoureux, Marion retrace ses journées de conseillère, toujours les mêmes entre la peur de se faire agresser par des demandeurs d'emploi sous tension et l'envie de venir en aide à des gens qui n'ont rien.

Marion Bergeron - c'est son vrai nom - relate, page après page, les affres d'une fusion qui bloque, la complexité du système, les relations humaines compliquées entre les ex-ANPE et les anciens de l'Assedic, l'impossibilité d'appliquer le suivi mensuel personnalisé quand les portefeuilles dépassent 150 chômeurs, les absences des conseillers pour surmenage qui ne surprennent plus personne, les rumeurs les plus folles qui courent sur les salariés de l'agence qui se suicident ou sont assassinés par des chômeurs en colère, les altercations quotidiennes avec les demandeurs d'emploi, les trucs et astuces de ses collègues pour trafiquer les chiffres de rendement, les demandeurs d'emploi qui ne viennent pas aux convocations. Mais aussi les radiations à tout va, le 3949, les entretiens de présentation du site internet de Pôle emploi à des chômeurs qui n'ont jamais touché un ordinateur de leur vie, les réunions d'équipe du vendredi après-midi où personne n'écoute personne, l'enfer des sigles internes (ECCP, EMT, EMTPR, DE, EXD, PPAE, GU, ZT...) et de l'informatique préhistorique, le changement de direction, l'absence de perspectives à offrir, les employeurs qui veulent un BAC+4 avec dix ans d'expérience payé au smic et si possible blanc, le zèle de certains de ses collègues, les syndicats qui bloquent l'installation dans le site unique ultra-moderne de l'autre côté de la rue...

Bref son quotidien de conseillère précaire pendant six mois dans une agence Pôle emploi du sud de Paris. Son quotidien de conseillère sans expérience RH recrutée un peu par hasard et bombardée, sans aucune formation et en pleine explosion du chômage, du jour au lendemain, au milieu de la détresse humaine, de la misère. Le récit est chronologique, donc parfois répétitif et indigeste. Qu'importe, il est surtout bourré d'anecdotes dans lesquelles chaque conseiller Pôle emploi se reconnaitra.


Une critique nuancée, donc. Mais également quelques contre-sens. Des précisions étaient nécessaires. L'auteur, Marion Bergeron, a donc rédigé un droit de réponse que Marc Landré a publié dans les commentaires de son article.
Monsieur Langré, je suis ravie que vous ayez pris la peine de lire mon récit et d'en faire un papier sur votre blog.

Cependant, je tiens à éclaircir quelques points. En effet, vous écrivez que mon texte relate "les radiations à-tout-va", or ce n'est précisément pas ce que je raconte. Au contraire, je décris une situation où les sanctions prévues ne sont pas appliquées. Mais, je peux comprendre que le côté répétitif et indigeste que vous avez trouvé à mon récit vous ait incité à sauter quelques pages. Je ne vous en veux pas.
D'autre part, comme je le précise au début du livre, chaque conseiller de Pôle Emploi ne se reconnaîtra sûrement pas dans mon récit. Étant donné la multitude de fonctionnement et de situations qui se côtoient au sein de cet organisme, mais également parce que j'étais une conseillère en CDD sans formation, ce qui n'est heureusement pas le cas de la majorité des effectifs.
Enfin, je trouve dommage que vous n'ayez pas apprécié le côté incarné et vécu de mon récit. Je ne raconte pas comment je me suis faite "plaquée par mon amoureux" mais comment ce travail a empoissonné ma vie privée au point d'en détruire ce que j'avais de plus précieux : mon couple. C'est d'ailleurs sur ce point que mon récit diffère des Confessions d'une taupe que vous citez en exemple. Je ne me cache pas sous un pseudonyme, j'assume ce travail qui m'a abîmée, qui m'a changée. Je crois que c'est, par ailleurs, ce qui fait la qualité de ce livre. Sa réalité. Et son exploration de ce que peut être, aujourd'hui, la souffrance au travail. Mais, il est vrai que,  pour vous, la souffrance au travail est une question malsaine, fausse et taboue, comme vous le faisiez durement remarquer dans votre post du 15 novembre 2009, Souffrance au travail : le trop plein. Je comprends donc que vous ne m'ayez pas comprise.

En vous remerciant d'avoir pris la peine de me lire, à nouveau.

Le Livre

Avril 2009, France, banlieue parisienne. Au cœur de la crise qui explose, une jeune femme franchit la porte de Pôle Emploi. Fraîchement embauchée par ce nouvel organisme tristement célèbre qui se charge de l'indemnisation et du conseil des chômeurs.

Plongée dans les entrailles du système, les deux mains dans la boue, elle raconte l'envers du décors. La violence de la misère. L'apprentissage de l'impuissance. Le zèle absurde des fonctionnaires. Le gouffre qui sépare les annonces politiques de la réalité du terrain. Le naufrage inéluctable d'une administration inhumaine qui détruit, sans remords, ses usagers et son personnel.

Prisonnière de son guichet d'accueil, méprisée et épuisée, elle raconte ce travail qui balaie sa vie privée, emporte ses principes, et brûle ses dernières illusions.

Ce livre n'est pas une compilation d'anecdotes. Ce n'est pas un ultime état des lieux du marché de l'emploi et de l'administration française. C'est le récit de six mois de travail précaire. Une réalité crue, bouillonnante de souffrance et de désespoir. Bienvenue en enfer. Bienvenue à Pôle Emploi.

25 ans, mi-parisienne, mi-banlieusarde, graphiste, précaire, étudiante, chômeuse, free-lance, Marion Bergeron est à l'image de la jeunesse française : énergique et motivée, mais trop jeune pour le marché du travail. Contrainte de composer entre son projet professionnel et le règlement de son loyer, elle a postulé chez Pôle Emploi presque par hasard, sans trop y croire. Pour six mois de CDD. Et a finit par retourner pointer aux Assédics, jusqu'à la prochaine fois.

© photo : Julien Bourgeois

lundi 30 août 2010

Extrait : Avertissement avant lecture

Je me prénomme Marion. Ce n'est pas un pseudonyme. J'ai été recrutée par Pôle Emploi alors que j'avais vingt-quatre ans et aucune expérience ni dans le secteur de l'emploi, ni dans celui de l'insertion. J'ai fait partie des 1840 CDD de six mois embauchés en avril 2009 pour faire face à la crise. Je livre ici mon expérience qui n'a rien d'une parole d'évangile. Chez Pôle Emploi, malgré tous les efforts de Monsieur Christian Charpy pour aboutir à un semblant de normalisation, rien ne diffère plus d'une agence qu'une autre agence. Mon témoignage est unique. Il n'est pas le reflet d'un fonctionnement national. Les demandeurs que j'ai rencontrés sont inimitables. Ce sont les habitants d'une banlieue parisienne aux allures de ghetto. Ils n'ont rien en commun avec la population du XIVe arrondissement de la capitale, pourtant si proche, ni avec celle de la Creuse ou de la Corse. Mes collègues, ma direction, mes bureaux, mes employeurs ne peuvent servir d'exemple. Ils ne sont qu'un bref éclair dans la nuit noire de la France en crise.
Chers lecteurs, ne vous vautrez pas dans la fange des généralités. Rien n'est jamais si simple avec la réalité.

Extrait : Premières pages

Le métro, deux changements, la dernière station de la ligne, marcher le long de la grande route, trois commerces désaffectés, un immeuble à démolir, une station-service, un ivrogne qui tente de m'agripper, un fleuriste spécialisé dans les compositions funéraires, un grand immeuble sale, un porche en béton, et un autocollant Anpe détrempé.
J'entre. Une lumière jaune étouffante et des cris. Une grosse femme, énorme, engoncée dans un manteau en plastique noir trop petit, fait de grands moulinets avec ses bras. Sa figure rouge aboie des insultes à toute l'assistance. Elle ne veut pas s'en aller. Elle veut faire ses photocopies. Les agents de l'Anpe ne sont que des imbéciles, et elle veut qu'ils le sachent. Elle braille et se démène, attrape le poignet d'une jeune femme qui lui demande de sortir.

Elle hurle. On lui hurle dessus. 
Allez-vous en ! Ça suffit !

Je reste figée au milieu de la pièce. C'est mon premier jour. Je viens de passer la matinée à regarder les aiguilles de la pendule tourner au siège des ressources humaines de Pôle Emploi. Et me voilà, dans mes nouveaux bureaux, dans la banlieue sud de Paris, plantée entre une folle hurlante, deux ou trois badauds et mes collègues furibonds, avec, sur le dos, un tailleur pantalon de viscose noire beaucoup trop chic.
L'espace d'un instant. Quelques secondes à peine. J'hésite. Si je m'enfuis. Maintenant. Personne ne le saura. Personne ne m'en voudra.
Mais, on me demande déjà qui je suis. Et l’on tombe des nues d'apprendre qu'il y a une nouvelle recrue. Personne n'est au courant, pas même la directrice adjointe. Je débarque donc, comme un cheveu sur la soupe, entre une rixe et l'indisponibilité de mes collègues. Marine prend l'initiative. Petite, rousse, jeune, jean délavé et  tee-shirt bleu ciel trop grand. Elle me fait signe de la suivre et je pénètre la partie « privée » de l'agence. Même lumière jaune.
Bureau après bureau, elle me présente. Sourires gênés. Regards en coin. « La pauvre, elle est arrivée en plein milieu du clash à l'accueil. » Une espèce de grande brune irascible se plante en face de moi. Me barrant le passage. Mains sur les hanches. « Alors ? C'est quoi ton parcours ? Tu as déjà bossé en agence ? Comment ça ? Tu n'as aucune expérience ? Voilà, ce qu'ils nous envoient ! Et, tu sais que tu es mieux payée ? Nous, on a passé un concours ! » La douche froide. Elle me récite son discours syndicaliste. Je ne suis pas de la direction. Elle s'en moque. La petite rousse tente de la calmer. Rien n'y fait.

Toute son amertume 
et sa frustration se déversent. 
Sur moi. 

Un flot de méchanceté, ponctué de deux ou trois « mais, ce n'est pas ta faute ». Avec mon grand sourire collé sur ma figure, je me dis que je savais à quoi m'attendre. Le travail, ce n'est pas une sinécure. Et devenir conseillère à l'emploi, en plein milieu de l'explosive fusion Assedic/Anpe et de la crise financière, n'était pas le pari le plus aisé. La grande brune n'en finit pas de me remplir les oreilles de son dégoût. Elle se prénomme Estelle. Elle porte un pantalon kaki mal coupé et un débardeur crème qui lui brouille le teint. Ses cheveux mous tombent sur ses yeux et elle est obligée de les plaquer sur le côté entre chaque phrase pour ne pas les manger. Elle pourrait être jolie, silhouette mince et traits réguliers. Mais ses épaules sont voûtées et son visage, trop allongé, donne l'impression de dégouliner. Comme elle a manifestement un besoin irrépressible de se purger, je fais bravement semblant de l'écouter. J'arrive même à placer un « Ce n’est pas faux. » qui m'offre le soulagement d'un petit fou rire intérieur. À la guerre comme à la guerre !
Je n'ai pas le temps de faire connaissance avec le reste de l'équipe. Entretien avec la directrice adjointe. La cinquantaine, petite, brune, potelée et souriante. Avec ses lunettes et son pull de grand-mère, elle pourrait tout aussi bien être institutrice, secrétaire de direction ou assistante sociale, mais forcément estampillée service public. Elle a ce petit goût de fonctionnaire. Poussière et savon au citron. Elle n'a pas mon CV et je lui explique mon parcours. Sept postes sont vacants dans l'agence, alors, même si j'avais été vendeuse spécialisée dans les poissons exotiques, elle aurait été contente. Elle me trace le cadre administratif de mon poste : le pointage sur fichier Excel, les RTT, les tickets restaurant, et tout un tas de précisions parfaitement ennuyeuses mais ô combien essentielles. Comment ça ? Prise de poste à huit heure quarante-cinq ? Je vais être en retard tous les matins, ça commence vraiment bien.
Elle me prend un rendez-vous pour la visite médicale. Avec tous les CDD que j'enchaîne, en bonne moins de vingt-cinq ans à situation professionnelle flexible, cela doit bien être ma troisième visite annuelle de l'année. C'est alors qu'il se produit une sorte de dysfonctionnement. Geneviève est là, assise devant son ordinateur. Face à Outlook. Avec le mail pour la visite. Et, je me rends compte qu'elle ne sait pas mettre un destinataire en copie. Elle hésite. Elle doute. Elle s'embourbe. Poliment, j'apprends à ma supérieure la manœuvre, il est vrai si complexe, qui permet de mettre le directeur de l'agence en copie dudit mail. Un grand vide s'ouvre devant moi, et je n'ai d'ailleurs toujours pas compris comment elle avait pu survivre jusqu'ici sans savoir se servir de sa messagerie.
Enfin, elle tente de me dessiner l'organisation de l'agence. Elle me perd dans sa jungle de sigles et se rend bien compte que je ne comprends rien ni à la PST, ni à la ZTT, ni au PPAE. Je ne suis pas du métier. Je ressors de son bureau avec mes neurones dans un petit seau. Tous mélangés. Dans le couloir, je jette un coup d'œil au planning : SI, AA, SMPS, etc.

Mon premier défi : 
apprendre à parler Pôle Emploi.

J'ai droit à un joli casier. Mais pas à un bureau. D'ailleurs, personne n'en a. Ici, les conseillers sont volants. Rien à voir avec Superman. Les bureaux sont affectés à une fonction et non à un fonctionnaire. Il y a les bureaux d'entretien, les bureaux de base arrière, les bureaux administratifs, etc. Chaque agent se déplace de pièce en pièce. Une pile de dossiers sous le bras. La tasse à café coincée entre le menton et l'épaule. En baladant son « chien ». Rien à voir avec la brigade canine. Mes collègues se promènent en tirant un casier à roulettes. Au début, j'ai cru que l'on déménageait. Ce petit bloc tiroir, qui contient le kit de survie : une agrafeuse et des agrafes, quelques stylos, un bloc Post-it, deux kilos de dossiers et trois de documentation, a hérité du surnom un brin affectueux et cordialement ironique de « chien ».
Pas question de me voir remettre ce privilège à roulettes pour le moment. En tant que débutante, je vais être cantonnée à l'AA. L'accueil actif. En première ligne. Dans la zone de libre accès. Là où la grosse femme hurlait des horreurs. Il paraît que c'est le meilleur endroit pour apprendre. Vivement demain !
[...]

Extrait : Barbarie ordinaire

[…]
L'été parisien fait de nous des rats de laboratoire. Condamnés à tester la résistance aux hautes chaleurs de l'organisme humain. L'accueil est un vestiaire d'après match de football. Les demandeurs gouttent sur les claviers des ordinateurs qui montrent de sérieux signes de faiblesse. Les semelles de la file d'attente fondent sur le carrelage orange. La baie vitrée transpire une mince couche graisseuse légèrement jaune. Et une persistante odeur de pied envahit mes narines à chaque inspiration.
Rien ne change. Le dernier jour de la semaine est comme les autres. D'une violente banalité. Enracinée derrière mon pupitre d'accueil, j'agonise doucement de peur et d'ennui. L'homme qui se tient face à moi agite avec agacement son avertissement avant radiation sous mon nez. Je consulte son dossier. L'ordinateur pousse un long râle de souffrance. Le ventilateur est au bord de l'apoplexie. L'homme ne s'est pas présenté à son dernier rendez-vous. Son dossier n'est qu'un long catalogue d'absences, d'avertissements, de radiations et de rattrapages de dernières minutes. Il me regarde comme s'il venait de tomber de la dernière pluie. Comme s'il ne comprenait rien à l'objet de ce courrier. Qu'il a pourtant déjà reçu une bonne vingtaine de fois. Je lui donne la procédure. Et, las de son air scandalisé, achève ma petite récitation sur un « vous avez l'habitude » qu'il saisit au vol. Il plante ses deux poings sur la tablette de contreplaqué de mon comptoir. Et rive ses deux pupilles noires de fureur dans les miennes pour me demander ce que je sous-entends. C'est pourtant clair, je sous-entends qu'il est un habitué des absences, qu'il connaît très bien la procédure et que je ne suis pas dupe de son attitude offusquée. Mais, je sais qu'il est déjà trop tard. Quoique je dise maintenant, il est inévitable que cet homme se mette en colère. Il n'a pas l'intention de rédiger la moindre lettre d'explication. Il se fiche de connaître les raisons de ce courrier. Il est venu faire du grabuge.

Je respire une dernière fois.
L'odeur de pied est toujours là.

Et, c'est comme dans un cauchemar. L'image ralenti. Le son disparaît. Sa main se referme sur mon poignet. Lentement. Par saccades. Il se penche sur moi. Les traits de son visages se brouillent. Je ne discerne plus que ses deux pupilles noires. Luisantes comme l'acier. Ma main est toute froide entre ses doigts. Sa voix est rauque et profonde. Granitique. Inébranlable. Elle résonne lourdement au fond de ma poitrine. « Tu vas bouger ton cul et aller chercher le directeur où je te casse ta gueule de salope ». Je ne bouge pas. Il libère mon bras. Je ne baisse pas les yeux. Je le fixe en rassemblant mes affaires. Mon téléphone. Mes cigarettes. Je ne réponds rien. J'abandonne mon pupitre. Passe tout près de lui. Fends la file d'attente. Contourne la photocopieuse. Les tables. La maman avec la poussette. Tout est flou. Les panneaux d'affichage. Les rangés de documentation. Tout est loin. La cuisine. Les larmes coulent sur mes joues. Tout est noir. Je ne sais pas combien de temps je suis restée, debout devant la fenêtre de la salle de repos, figée dans un long sanglot muet, avant que Cécilia ne vienne se chercher un café.
Elle m'écoute quelques minutes. Me colle une tasse chaude entre les mains. Réuni mon badge, mes cigarettes et son briquet dans ma poche. Me conduit à la porte de derrière et file s'occuper de l'homme de l'accueil. Le soleil ne se gène pas pour brûler mes paupières douloureuses. Je profite, inerte, du calme poussiéreux de la grande route avant de retourner à mon poste. Où, comme une coquille vide, je déroule des partitions de conversations mécaniques. Me perdant dans les gestes répétitifs et les sourires factices. Incapable d'accorder le moindre intérêt à Julie qui nous fait une longue présentation des nouveautés de l'intranet pendant la réunion. Je ne parle à personne de l'altercation de la matinée. Je connais déjà leur réaction désolée et impuissante. 
Le lendemain matin, mon médecin garde la bouche grande ouverte pendant que je lui raconte mes mésaventures professionnelles. Il me prescrit une semaine d'arrêt et des antidépresseurs. Je respire à nouveau. L'odeur de pied a disparu.
[...]

Extrait : Télé-candidature et Transsibérien

[…]
Il y a cependant quelques comètes imprévues et magnifiques, et l’une d’elles se tient juste devant moi. Un homme, la cinquantaine, pull-over rouge pétard et jeans délavé me demande poliment, avec un petit sourire discret, s'il me serait possible de lui donner du papier, car, m'explique-t-il dans un chuchotement respectueux, l'imprimante de l'ordinateur qu'il utilise dans la Zone de Libre Accès en manque. Je réalise que j'ai affaire à un véritable gentleman. La plupart des usagers rencontrant cette complication se contentent de s'agiter sur leur chaise en me hélant grossièrement de l'autre bout de la pièce. C'est la première fois que je vois un demandeur faire patiemment la queue pour une demande de ce type. Je file donc lui chercher son papier au pas de course pour recharger l'imprimante, qui, de joie, se met à débiter une liasse considérable d'offres d'emploi qui viennent nous noyer les pieds. Il s'excuse mille fois devant le monticule de papier. 

J'en oublie complètement la file d'attente 
et frise carrément l'excès de zèle en m'inquiétant 
du bon déroulement de sa recherche. 

Je sais pourtant que je n'ai pas de temps pour ce genre de préoccupations contre-productives. Mais, il se trouve justement que mon demandeur de l'année se bagarre pour comprendre le principe de la télé-candidature, et que je ressens un irrépressible besoin de lui rendre la politesse. Je lui expose donc dans les grandes lignes les mystères de la télé-candidature. Et le regarde, effarée, prendre en note ce que je lui raconte sur un petit calepin bleu.
La file d'attente, à ma grande surprise, ne manifeste pas une allégresse bienheureuse devant cet adorable tableau. Et je suis contrainte de retourner à mon poste. Lui conseillant de ne pas hésiter à m'interrompre en cas de problème. Lui précisant de ne pas refaire la queue. Il ne tarde pas à s'emmêler les pinceaux sur le site internet. Je me retrouve donc avec mon demandeur en or debout à ma droite, derrière mon pupitre, profitant de chaque ralentissement du flux pour compléter sa télé-candidature, me remerciant chaudement à chaque fois, et détournant autant qu'il le peut les yeux lorsque je consulte le dossier d'un autre demandeur.
En théorie, ce cas de figure ne devrait jamais se présenter. L'accueil devrait toujours être tenu par deux agents, l'un se chargeant de traiter les questions et demandes diverses de la file d'attente, l'autre patrouillant entre les ordinateurs pour voler au secours des bras cassés de l'informatique. C'est ce qu'indiquent les descriptifs de poste et la charte qualité. Mais, il semble malheureusement que le fonctionnement de Pôle Emploi repose avant tout sur la sainte maxime spécialement inventée pour l'occasion : quand on peut le faire à deux, on peut le faire tout seul. Le sous-effectif est la règle. Et pas question d'avoir deux salaires pour la peine.
Toutes les agences ne fonctionnent pas pour autant sur le même modèle. Il en existe où tout un escadron d'agents se charge de l'accueil, de la Zone de Libre Accès et du Service Immédiat. Pourtant, Pôle Emploi a beau essayer de normaliser tout cela, à grand coup de charte qualité et de descriptif métier, la débrouille reste le seul moyen de faire tourner la machine. Ici, les conseillers se sont battus bec et ongles pour conserver le SI, le Service Immédiat, qui reçoit les demandeurs se présentant sans rendez-vous avec un problème complexe. Afin de ne pas les renvoyer sur le 3949 où sur leur prochain entretien de suivi mensuel. En contrepartie, nous avons du renoncer à positionner un second agent à l'accueil. Dans l'univers fantastique du sous-effectif, tout se paye. 

En l'occurrence, 
ce sont les conseillers qui paient le maintien 
d'un service aux demandeurs.

Remplir cette fichue télé-candidature est pour le moins laborieux. Il faut tout rédiger : la motivation, la formation, l'expérience, les compétences diverses. J'apprends que mon demandeur est d’origine polonaise, et qu'il possède tout un catalogue de diplômes et d’expériences : licence d’économie, de droit, champion européen de tennis de table, chef d’entreprise, chauffeur de maître, responsable de village de vacances, il parle parfaitement le russe, le polonais, l’anglais, l’allemand et le français. Il revient de Russie où il dit avoir passé les cinq dernières années, retiré au fin fond de la taïga, en pleine Sibérie, sur les rives du lac Baïkal, à quelques kilomètres de la tentaculaire cité industrielle d'Irkoutsk. Mes neurones sautent au plafond.

Je connais ce paysage. 
Je l'ai rêvé mille fois, 
le nez plongé dans des atlas immenses. 

Le Transsibérien, ce train mythique dans lequel j'ai tant de fois imaginé embarquer, court le long du lac Baïkal et marque l'arrêt à Irkoutsk avant de pénétrer dans les terres mongoles. Il me regarde avec un grand sourire approbateur. Il est monté à bord du Transsibérien, il a vu l'immensité transparente du lac Baïkal, il connaît l'odeur du smog sur la vallée d'Angaran, les petites maisons de bois d'Irkoutsk qui s'enfoncent dans le sol jusqu'aux fenêtres, le tramway d'un autre siècle qui s'arrête au petit bonheur la chance en plein milieu des carrefours, et les clochers à bulbes étincelants de l'Église du Sauveur.
À dix-sept heure, je ferme l'agence et raccompagne chaleureusement Monsieur Zaranovitch. Il est resté tout l'après-midi. Entre mon pupitre et son ordinateur. Il a réussi à envoyer sa télé-candidature. J'ai appris que vivait, sur les îles du lac Baïkal et nulle part ailleurs, le seul et unique phoque d'eau douce au monde. Le nerpa, animal d'un naturel très curieux se laissant facilement approcher en bateau. Pour un peu, nous aurions bu le thé. Dans la pénombre des volets clos, pendant que je verrouille mon casier, l'accueil prend silencieusement des airs de gare soviétique.

[...]

dimanche 29 août 2010

L'auteur : Marion Bergeron

25 ans, mi-parisienne, mi-banlieusarde, graphiste, précaire, vendeuse en boulangerie, intérimaire, apprentie, étudiante, chômeuse, free-lance, Marion Bergeron est à l'image de la jeunesse française : énergique et motivée, mais trop jeune pour le marché du travail. Contrainte de composer entre son projet professionnel et le règlement de son loyer, elle a postulé chez Pôle Emploi presque par hasard, sans trop y croire. Pour six mois de CDD. Et a fini par retourner pointer aux Assédics, jusqu'à la prochaine fois.

© photo : Julien Bourgeois