dimanche 4 septembre 2011

Altercations, incivilités, mépris : travailler à Pôle emploi vous use

Marion Bergeron est l'auteur de "183 jours dans la barbarie ordinaire", livre dans lequel elle raconte son CDD de six mois à Pôle emploi. Elle a répondu aux questions des internautes de L'Express.fr. Le chat, dans son intégralité, à retrouver en ligne.


Charly : "Barbarie"! Connaissez-vous réellement le sens de ce mot ? Ne pensez-vous pas que ce terme est inapproprié et plutôt utilisé à des fins commerciales ?
Marion B : Effectivement, le terme barbarie est fort. Mais, il illustre parfaitement ce que j'ai vécu pendant 6 mois. Une barbarie ordinaire, qui se répète chaque jour et qui vous détruit. C'est pour cela que j'ai souhaité témoigner, parce que ce que je vivais était particulièrement dur.

Sonia : Bonjour, je suis en recherche d'emploi et je suis d'accord avec vous sur le fait que Pôle emploi ce n'est pas toujours simple. Mais quand même n'abusez vous pas un peu ?
Dans mon texte, tout est vrai. C'est un témoignage. Je n'ai jamais forcé le trait. Je peux même vous dire que j'ai préféré taire certaines anecdotes qui me paraissaient trop dures. Certains de mes collègues qui ont lu le texte m'ont trouvée parfois trop dans la retenue. Il est pourtant vrai que toutes les expériences sont différentes, en fonction de l'agence dans laquelle vous vous trouvez mais aussi de la typologie sociale du lieu où elle se trouve.

Eric : Je viens de terminer votre livre. Témoignage très impressionnant, mais aussi parfois surprenant envers les chômeurs. "Sa chemise noire le saucissonne comme un petit boudin", "elle sent le poulet frit", sont quelques unes de vos expressions envers eux. N'est-ce pas aussi une forme de barbarie ordinaire ?
Lorsque l'on prend le parti de décrire la réalité telle qu'on l'a vécue, il est trop malhonnête de faire dans le politiquement correct. J'ai aussi voulu retranscrire la façon dont l'accueil peut vous abîmer et influer sur votre vision des choses. La ronde infernale des altercations, des incivilités, du mépris finit par vous user. Vous devenez dure. Merci de m'avoir lue !

Derrick : Graphiste reconvertie en conseillère pour l'emploi, vous incarnez parfaitement le paradoxe de cette administration. C'est Pôle emploi qui vous a proposé ce job ?
Non, Pôle emploi ne m'a pas proposé ce travail. Mais, j'en avais parlé à ma conseillère de l'époque et elle avait trouvé que c'était une bonne idée. D'un côté, moi, je ne trouvais pas de travail. De l'autre, Pôle emploi avait du mal à trouvé 1840 recrues. Pourtant, je pense que j'aurais pu faire une bonne conseillère, si j'avais reçu une formation digne de ce nom et si je n'avais pas été utilisée comme une rustine à l'accueil.

Bobo : Après 6 mois passés chez Pôle emploi au printemps 2009, soit 6 mois après la fusion effective des ex-organismes, pensez-vous être en mesure de décrire objectivement la situation actuelle ou est-ce un livre d'histoire ?
C'est un témoignage. Je ne fais pas une analyse documenté de Pôle emploi et de son fonctionnement. Je raconte six mois de travail précaire, de l'autre côté du guichet. Et cela, oui, je suis capable de le décrire objectivement, parce que c'est tout simplement ce que j'ai vécu.

Babette : "Je quitte mon pupitre et perd de longues secondes à contourner sa grosse masse flasque", écrivez-vous à propos d'une expérience avec un demandeur d'emploi. Pourquoi blesser gratuitement comme cela ?
Ce demandeur vient de m'agresser. J'ai du mal à le trouver séduisant, je l'avoue. Alors, je le décris tel qu'il est à ce moment-là. Quelqu'un qui n'a rien d'aimable.

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